Organisations colombiennes de défense de la vie et des droits des peuples

Les organisations sociales, syndicales, paysannes et de défense des droits humains réunies dans le cadre du programme de coopération commun « Travail décent en Colombie » partageons notre inquiétude quant à la manière dont les écarts sociaux, politiques et économiques existants dans le pays sont renforcés par les mesures prises par le gouvernement national colombien afin d’affronter l’émergence du COVID-19 et ses conséquences à moyen et long terme.

Ces mesures servent à protéger les intérêts du grand capital national et international au lieu de protéger la vie des travailleurs et travailleuses urbain∙es et ruraux∙les, les communautés paysannes, indigènes et afro-descendantes du pays, les travailleurs et travailleuses du secteur de la santé, les personnes concernées par l’économie informelle ou les contrats de prestation de services, les enfants des secteurs plus vulnérables de la campagne et de la ville, les femmes en situation de vulnérabilité entre autres.

Nous exigeons de la transparence concernant la base scientifique qui provoque la prise de mesures.

Ce manque de gouvernance en Colombie traverse campagne et villes. Le 2 avril 2020, nous comptons déjà 71 dirigeants syndicaux et défenseurs des droits humains assassinés, un nombre qui se maintient en hausse, aggravant la situation de peur et d’incertitude que cause le confinement dû au COVID-19.

Il est urgent que le gouvernement national respecte, quant à la sécurité de la population, ce qui était convenu dans l’accord final de paix et l’implémentation de normes pour protéger la vie des syndicalistes, dirigeant∙es et défenseur∙euses des droits humains, comme celle des communautés paysannes et ethniques sur leur territoire, comme l’indique le décret 660 de 2018. La protection ne sera assurée que quand le gouvernement national décidera de réellement examiner les cas d’enquête, judiciarisation et capture des responsables matériels et intellectuels de ces cas.

Nous exigeons que le procureur général de la nation remplisse sa fonction et progresse en matière d’impunité qui, à présent, dépasse les 95% par rapport aux auteurs intellectuels.

La raison profonde de ces pandémies est profondément liée aux formes de production et de consommation du modèle économique dominant. L’accaparement des biens de production fondamentaux tels que l’eau et la terre pour garantir la reproduction de la vie en série ne respecte pas l’équilibre écosystémique minimal et a pour unique but d’approvisionner un consommateur vorace.

La lutte pour la terre, le territoire et la souveraineté alimentaire a aujourd’hui plus d’importance que jamais. Nous demandons la reconnaissance de la paysannerie comme sujet politique et de droits qui contribuera à résoudre l’approvisionnement de produits alimentaires dans la population urbaine et rurale, et à renforcer l’investissement dans une infrastructure routière, sociale, économique, dans le but de générer les conditions de vie digne à la campagne. Nous dénonçons, dans le cadre du COVID-19, la déviation des aides pour la population des communautés paysannes
et ethniques liées aux systèmes d’approvisionnement local, régional et national ; selon le rapport du Contrôleur du 17 avril, 90% des ressources de crédit destinées à garantir la production agricole sont concentrées aux mains de bénéficiaires qui les utilisent pour des activités non productives.

Nous exigeons de redéfinir le modèle de production agricole et ceci commence par la reconnaissance des communautés qui ont le véritable potentiel de le transformer

De toute évidence, les mesures prises en faveur des entreprises n’ont pas non plus été prises pour protéger les travailleur∙euses. Nous rejetons la régression et la violation des droits du travail. Nous rejetons la flexibilisation et la précarisation du travail. Selon l’Observatoire du Travail, en temps de Coronavirus, de la CUT et de la CTC, sur 1 125 demandes présentées par des organisations syndicales ou travailleur∙euses au ministère du travail jusqu’au 17 avril, à peine 1% a débouché sur une sanction du comportement entrepreneurial.

Nous vivons une époque très difficile pour les travailleur∙euses et la population en général, non seulement à cause de la pandémie du COVID-19, mais également à cause des capitalistes qui, avides d’accumulations, prétendent aujourd’hui faire mainmise sur nos acquis, et le gouvernement des entreprises leur a facilité à nouveau les choses. La circulaire 033 du 17 mars 2020 établit les bases pour convoquer la « concertation » entre les parties, c’est-à-dire entre les travailleur∙euses et les patrons où les syndicats sont absents et où les conventions collectives de travail peuvent être renégociées.

Apoyamos a la Central Unitaria de Trabajadores CUT para que consolide una orientación única frente a la circular 033, y nos articulemos en un plan de trabajo colectivo para enfrentar esta arremetida. Así como la articulación del movimiento sindical al lado de otras expresiones sociales, para que, en coordinaciones regionales y nacionales nos permita hacerle frente a esta amenaza.

Nous soutenons la Centrale Unitaire des Travailleur∙euses CUT pour qu’elle consolide une orientation unique face à la circulaire 033. L’articulation du mouvement syndical aux côtés d’autres expressions sociales nous permettra aussi d’affronter cette menace au niveau des coordinations régionales et nationales.

Nous exigeons le respect du dialogue social institutionnalisé entre représentants de travailleur∙euses et représentants des employeur∙euses ainsi que des conventions collectives. Nous exigeons que le ministère du travail remplisse sa fonction de garant du respect du droit du travail.

En Colombie, il y a 687 716 travailleur∙euses domestiques qui gagnent moins que le salaire minimum et qui n’ont pas de sécurité sociale, ce qui les oblige à travailler sans répit. 11,7% a plus de 60 ans et grand nombre d’entre elleux sont des mères célibataires qui travaillent pour nourrir leurs enfants. Celles-ci n’ont aucune garantie pendant cette période de quarantaine ni pour la période post quarantaine. Leur situation est désespérée puisque leurs employeur∙euses n’auront plus non plus de travail ou percevront des revenus plus bas. Elles n’ont pas non plus accès aux programmes d’assistance sociale du gouvernement, infectés du virus de la corruption auquel s’ajoute aujourd’hui le coronavirus.

Nous exigeons au gouvernement national de garantir le droit au travail, à la sécurité sociale, à un salaire, à l’alimentation et à la vie des travailleur∙euses domestiques.

La politique néolibérale adoptée en Colombie depuis 1990, avec l’ouverture économique et ensuite la loi 100 de 1993, ont transformé la santé en marchandise. L’urgence sanitaire causée par le COVID-19 a clairement démontré l’échec de ce système. Pourtant, les normes du système de santé appliquées à partir de la loi 100 de 1993 n’ont pas été respectées par l’employeur∙euse.

Les organismes de contrôle font la sourde oreille parce qu’ils n’ont pas l’infrastructure nécessaire pour contrôler ou parce qu’ils sont cooptés par les employeur∙euses. Nous exigeons que tant les employeur∙euses que les organes de contrôle remplissent leur fonction de prévention pour tous les postes de travail et que les travailleur∙euses puissent aussi y participer pour que, entre tous, les normes établies soient respectées. Tout le personnel soignant, soit 674 945 personnes, selon l’observatoire du travail de la CUT et de la CTC, doit disposer d’équipement de sécurité et de biosécurité pour exécuter ses fonctions et ses tâches en toute sécurité et ce, dans toutes les régions du pays.

Nous exigeons la dérogatoire de la loi 100 de 1993 et une protection effective afin de prévenir la contagion du COVID-19 sur le lieu du travail. La santé est un droit.

Les familles rurales et urbaines n’étaient pas prêtes à respecter des mesures comme celle de l’isolation obligatoire, le travail informel et autres vécus des familles en Colombie commencent à générer de la violence intrafamiliale et aujourd’hui, nous voyons l’augmentation de ce genre de cas, c’est pourquoi nous exigeons aux gouvernements en place proposer immédiatement des aides économiques et l’accompagnement à la citoyenneté pour éviter que le stress, les craintes et les doutes qui dérivent de l’incertitude sur les revenus ne génèrent dans les familles une série de traumas qui affectent le développement personnel de chaque individu.

Nous exigeons la prévention de la violence de genre et la justice et réparation pour les victimes.

Nos organisations remercient la force solidaire des organisations sociales et syndicales de Belgique et les exhortons à ce qu’elles continuent à soutenir notre cause, une seule voix, un seul cri qui transforme le monde pour changer enfin la « normalité » vers laquelle nous ne voulons définitivement pas revenir, mais sans pour autant perdre ce que nous avons acquis.

Que la distance ne soit pas un obstacle, pour que la solidarité continue à nous unir avec pour but de protéger la vie, mais jamais au prix de la vie, qui est notre dignité propre.

Signatures
ACASA - Asociación Campesina de San José de Apartado
Asociación Tierra y Paz
ATI – Asociación de Trabajo Interdisciplinario
COISO - Corporación Colectivo Intersindical de Salud Ocupacional
Comité SALSA B.C. - Comité de Integración por la Soberanía Alimentaria Bogotá, Cundinamarca.
Corporación para el Fortalecimiento de la Función Social Aury Sara Marrugo
CUT - Central Unitaria de Trabajadores de Colombia
FENSUAGRO - Federación Nacional Sindical Unitaria Agropecuaria
IPC – Instituto Popular de Capacitación
RENAF - Red Nacional de Agricultura Familiar
SINALTRAINAL - Sindicato Nacional de Trabajadores del Sistema Agroalimentario
SINTRACATORCE - Sindicato Nacional de la Industria Azucarera 14 de junio
SINTRAIMAGRA - Sindicato Nacional de Trabajadores de la Industria de Productos Grasos y Alimenticios
USTIAM - Unión Sindical de Trabajadores de la Industria Cervecera, Bebidas, Alimentos, Malteros y Similares
USO – Unión Sindical Obrera de la Industria del Petróleo

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