AB InBev : « Nous nous battrons jusqu’au bout ! »

Dominique Sagot travaille chez AB InBev à Jupille depuis 28 ans. Depuis jeudi dernier, il est en grève pour défendre son droit et celui de ses collègues à travailler dans un environnement sécure. La réaction du géant de la bière malgré ses longues années de service ? Des menaces et une injonction de 3.000 euros à payer dans les 24h. Entretien.

Comment AB InBev a-t-elle protégé les travailleurs depuis le début de la pandémie ?

Depuis le début de la pandémie, nous avons eu des cas de contaminations dans le département logistique. Nous n’étions pas bien protégés. Nous n’avions pas de masques et puis nous n’en recevions qu’un par semaine. Nous avons demandé qu’ils désinfectent les bureaux et qu’ils nous fournissent un masque par jour. Cela a été fait, mais il reste malgré tout des lacunes... A titre d’exemple, les vestiaires n’ont jamais été désinfectés.

Plus récemment, 11 personnes du département logistique ont été infectées. Que s’est-il passé ?

Fin août, un foyer de contamination au coronavirus a été découvert au département logistique. La direction n’a pas directement effectué de tracing, malgré les demandes des représentants des travailleurs. 11 personnes ont été contaminées, dont une dans le coma. Si la direction avait écarté les personnes qui avaient été en contact avec celles avérées positives nous n’en serions pas arrivés là. La réaction a été trop lente. Il a fallu attendre une semaine pour que tout le monde soit testé. Au jour d’aujourd’hui, plus d’une semaine après mon examen, je n’ai toujours pas reçu les résultats de la part de l’employeur.

Pourquoi avez-vous décidé de faire grève ?

La directrice des ressources humaines et le conseiller en prévention n’ont pas su gérer la crise. Ils ont voulu étouffer l’affaire, car si la logistique ferme, toute l’usine est à l’arrêt. Ce qu’on demande : qu’une enquête et une analyse soit menée et  que des mesures organisationnelles et sanitaires soient prises pour que ce genre de situation ne se reproduise plus. De plus, nous exigeons l’éloignement du site de Jupille de ces deux personnes responsables de notre protection, mais qui ont manqué à leurs responsabilités.

Quelle a été la réaction de la direction ?

La direction essaye de nous intimider. Elle envoie des huissiers accompagnés de gardes du corps sur le piquet. Dès qu’on entre dans l’usine, on nous suit. Les travailleurs reçoivent tous les jours des sms ou des appels téléphoniques de la part de la direction. Elle les menace de les congédier ou de ne pas renouveler les contrats des temporaires. Ces derniers jours les intimidations se sont intensifiées. Un huissier est venu chez moi hier délivrer une injonction : je dois payer 3.035 euros dans les 24h. Je n’étais pas à la maison et ma femme m’a appelé en pleurs. Elle ne travaille plus et nous avons des difficultés... Nous allons contester avec l’aide de l’avocat de la FGTB. Dans la signification, je suis accusé d’avoir empêché les collègues d’aller travailler. Ce n’est pas vrai. Les travailleurs font grève volontairement, nous n’avons obligé personne à nous suivre. Par contre, la direction fait le contraire : elle oblige les personnes à retourner travailler alors que la grève est un droit !

Est-ce que tu te sens bien représenté par la FGTB Horval ?

Absolument. Nous formons une bonne équipe et nous sommes bien encadrés par le secrétaire régional. Contrairement à nous, les verts ne se sont pas montrés solidaires avec les travailleurs contaminés. Ils poussent les gens à continuer à travailler et répandent, à la veille des élections, des informations mensongères insinuant que nous avons quitté la table des négociations. C’est faux !

En tant que délégué Horval depuis 12 ans, je suis fier de représenter les travailleurs et de me battre pour leur santé et leur sécurité. C’est un combat plus que légitime et nous nous battrons jusqu’au bout !